Les cases / Boxes
Une newsletter en français et en anglais pour faire jaillir les "ah oui?!" / A newsletter in french an in english (at the end) to experiment some "ah oui ?!".
« Parfois c’est bien de faire ce que tu es supposée faire quand tu es supposé le faire »
Frances dans “Frances Ha” (2012)
25 octobre 2024. C’est la date précise à laquelle j’ai commencé à écrire cette première newsletter. C’était un jour ordinaire. Le seul soubresaut de mon quotidien était un chat qui ronronnait sur mes genoux. Une amie m’avait demandé de garder ce petit être dont le seul objectif de vie est d’être sur un humain. Ça m’allait très bien. Dans ce contexte, je réfléchissais à une énième manière de me réinventer. Rien de nouveau quand on me connaît et même quand on ne me connaît pas d’ailleurs (confère Instagram).
Pour les nouveaux, je suis une créative de bientôt 34 ans, devenue journaliste il y a plus de 10 ans. J’ai choisi ce métier passion car j’aspire au mouvement constant. Mon goût du savoir est sans limite ou presque. J’ai un besoin viscéral d’apprendre, la flamme justicière en plus (coucou Zola au lycée). Le journalisme m’est apparu alors comme la voie idéale pour assouvir ma curiosité. Avant cette étape cruciale, j’ai eu l’extrême chance de pouvoir faire des études sans charge mentale autre que celle de tracer ma route le mieux possible. La consciencieuse angoissée que j’étais se tenait à carreau, lucide notamment des privilèges qu’elle avait. Si je n’employais pas alors précisément le terme de « privilège », mot nécessaire qui fait fureur aujourd’hui, l’idée et les remises en questions étaient déjà bien là. Je sentais déjà les inégalités et les failles, biberonnée à l’Histoire ou du moins un morceau que me contait ma grand-mère adorée.
Peut-être vous demandez-vous où je veux en venir. Je dois l’avouer, je n’avais pas prévu de vous parler de tout ça en octobre puisque j’ai tout supprimé depuis mais l’idée globale était la suivante : les cases. Car, en cette première lettre faisant aussi office d’introduction et de présentation, je voulais faire la lumière sur le trouble que je peux causer sans le vouloir : dans quelle case mettre Nolyne ? En racontant d’où je viens, je cherche à me sortir des codes pures du journalisme et à livrer un peu de moi. A expliquer pourquoi j’ai, en plus de ma carrière bien trop définie à mon goût (la beauté en presse féminine), deux podcasts aux thématiques variées (la beauté, la musique et la poésie) que je vais mettre en avant à chaque fois ici et un nombre important d’activités annexes : le théâtre, le piano, le doublage de voix mais aussi les boutiques éphémères et j’en passe. La première image qui me vient est le dieu Shiva et ses multiples bras mais m’attribuer une telle antonomase m’est impossible à assumer, même pour son image parlante. Mais, coup du sort, il y a peu, l’annonce d’un nouvel ouvrage est arrivée dans mes mails : « Le complexe de la pieuvre » signé de l’artiste Severine C. Camus. Je l’ai lu et je me suis dit : « ah oui?! ». Je ne suis pourtant pas une adepte des livres de développement personnel mais m’apparenter à une pieuvre me semblait plus réaliste et acceptable qu’à une divinité. J’ai donc interviewé pour vous l’autrice. Voici notre échange, je vous retrouve juste après :
Nous y voilà. Ce besoin d’abattre les cloisons, je l’ai en moi depuis toujours. Je me suis sans cesse sentie hors champ, à côté, avec l’objectif quasi obsessionnel de déployer l’horizon. L’idée d’étudier un seul domaine me semble effroyable. Il me faut OUVRIR. Ouvrir grand les fenêtres et les interstices pour respirer, pour apprendre, encore et toujours. DÉCLOISONNER. Et c’est ce qui me plait avec cette théorie à l’animal totem évocateur. Il pourrait s’agir au premier abord d’une énième case où y placer un certain nombre de personnes. Mais, en réalité, elle concerne tout le monde pour peut qu’on en ait envie. L’envie d’un « ah oui?! », comme je l’espère vous le trouverez ici.
Quelques références culturelles qui m’évoquent de près ou de loin la question des cases et des conventions sociales.
Un film
« Un parfait inconnu » de James Mangold avec Timothée Chalamet dans le rôle de Bob Dylan. A bien des égards Timothée comme Bob sortent des cases et des conventions. Le film relate un moment charnière de la vie du chanteur, ce moment incandescent où Bob Dylan décide de suivre sa voie et non celle qui lui a été tracée. Ce moment où il n’est pas question de répondre aux désirs du plus grand nombre mais de celui qui compte le plus - bien que minoritaire : le sien.
Un podcast
« Strangers on a bench » de Tom Rosenthal est un podcast (en anglais seulement) d’une poésie folle. Tom nous fait écouter un échange spontané avec un étranger assis sur un banc. Ils ne se connaissent pas mais la magie opère à chaque fois. La beauté de ces rencontres réside tant dans leur universalité que leur unicité. Les cases y sont inexistantes. Mention spéciale pour les musiques de fin, à chaque fois nouvelle, car composées par un artiste différent d’après l’histoire entendue. Une pépite.
Un livre
« Moi, Tituba sorcière… » de Maryse Condé, prix Nobel de littérature alternatif en 2018. Attention, cet ouvrage fait état du pire de l’Homme et de ses actes au temps de l’esclavagisme. Il m’a prise aux tripes dès les premières pages et me remue encore aujourd’hui. Mais il est aussi et surtout un rejet des cases imposées, qu’elles soient raciales, sociales ou genrées. Maryse Condé dénonce le carcan des étiquettes et invite à refuser d’être défini par le regard extérieur. Un indispensable.
Du côté de « Vous avez un MP »
N’hésitez pas à aller (re)écouter l’épisode n°12 avec les artistes November Ultra et Patrick Watson. Tous les deux, à leur manière, touchent à tout, mêlent les genres et les références pour délivrer leur art singulier.
Et pour les plus punks d’entres vous, l’épisode n°2 avec le tourneur français Alain Lahana qui s’est longtemps occupé de David Bowie mais aussi de Philippe Collins ou toujours encore de Patti Smith devrait vous donner envie de faire fi des conventions.
"Sometimes it's good to do what you're supposed to do when you're supposed to do it."
Frances in Frances Ha (2012)
October 25, 2024. This is the exact date I began writing this first newsletter. It was an ordinary day. The only noticeable shift in my routine was a cat purring on my lap. A friend had asked me to look after this little creature whose sole purpose in life seemed to be to settle onto a human. That suited me just fine. In this context, I was once again contemplating yet another way to reinvent myself. Nothing new for those who know me, and even for those who don’t (hey Instagram).
For those just joining, I am a creative about to turn 34, and I have been a journalist for over a decade. I chose this profession out of passion, driven by an insatiable desire for constant movement. My thirst for knowledge knows almost no bounds. I have an intrinsic need to learn, fueled by a touch of righteous fire (hey again Emile Zola in high school). Journalism seemed to me the ideal path to satisfy my curiosity. Before reaching this crucial step, I had the immense privilege of pursuing my studies without the mental burden of anything other than carving out my best possible future. The anxious overachiever that I was stayed in line, acutely aware of the privileges I had. Though I may not have explicitly used the word "privilege" at the time—a necessary term now in vogue—the idea and self-reflection were already there. I could already perceive inequalities and gaps, having been nourished by history, or at least the piece of it that my beloved grandmother shared with me.
Perhaps you’re wondering where I’m going with this. I must admit, I hadn’t planned on talking about all this back in October, as I have since erased everything. But the overarching idea was this: boxes. Because, in this first letter, which also serves as an introduction and a presentation, I wanted to shed light on the confusion I might inadvertently cause—where does one categorize Nolyne? By recounting where I come from, I seek to step away from the pure codes of journalism and reveal a bit of myself. To explain why, in addition to my career—which feels far too defined for my taste (beauty in women’s press)—I have two podcasts covering a range of topics (beauty, music, and poetry), which I will highlight here each time, and a significant number of side activities: theater, piano, voice dubbing, pop-up shops, and more. The first image that comes to my mind is the god Shiva with multiple arms, but assigning myself such an antonomasia feels impossible to embrace, even if it is an evocative image. But, by some twist of fate, an email announcing a new book recently landed in my inbox: Le Complexe de la Pieuvre (The octopus’ complex) by the artist Séverine C. Camus. I read it and thought: "Ah oui?!" I’m not usually drawn to self-help books, but identifying myself with an octopus seemed more realistic and acceptable than with a deity. So, I interviewed the author for you. Here is our exchange—I’ll see you afterward:
Here we are. This need to break down barriers has been within me forever. I have always felt out of frame, on the sidelines, with an almost obsessive drive to expand the horizon. The idea of studying just one field seems terrifying to me. I need to OPEN. To throw open windows and gaps to breathe, to learn, endlessly. BREAKING BOUNDARIES. And that’s what I love about this theory with its evocative totem animal. At first glance, it might seem like just another box in which to categorize a certain group of people. But in reality, it concerns everyone—as long as they are willing. The willingness to say, "ah oui?!" (oh really?!) —a spark of curiosity that I hope you will find here.
The Anti-Box Selection
A Film
"A Complete Unknown" by James Mangold, starring Timothée Chalamet as Bob Dylan. In many ways, both Timothée and Bob defy conventions and categorization. The film recounts a pivotal moment in the singer’s life—the incandescent moment when Dylan chooses to follow his own path rather than the one mapped out for him. That moment when it is no longer about satisfying the majority’s expectations but about honoring the one voice that matters most, even if it is in the minority—his own.
A Podcast
"Strangers on a Bench" by Tom Rosenthal is a podcast of remarkable poetry. Tom lets us listen to a spontaneous exchange with a stranger sitting on a bench. They don’t know each other, yet magic unfolds every time. The beauty of these encounters lies in both their universality and their uniqueness. Boxes do not exist here. Special mention for the ending soundtracks, always new, as each is composed by a different artist based on the story just told. A true gem.
A Book
« Tituba : Black Witch of Salem » by Maryse Condé, Nobel Prize alternative winner in 2018. A word of caution—this book delves into the darkest aspects of human history during the era of slavery. It gripped me from the very first pages and still haunts me today. But above all, it is a rejection of imposed boxes, whether racial, social, or gendered. Maryse Condé denounces the shackles of labels and invites us to refuse to be defined by external perceptions. An essential read.
From "Vous avez un MP" (in french)
Don’t hesitate to (re)listen to episode 12 with artists November Ultra and Patrick Watson. Both, in their own way, touch on everything, blend genres and references to deliver their singular art.
And for the punkest among you, episode 2 with French promoter Alain Lahana, who has long worked with David Bowie, Phil Collins, and still collaborates with Patti Smith, should inspire you to defy conventions.
J’ai adoré 🫶🏻
(À bas les cases)
Déjà fan 💋